Voyage à Buenos Aires / Novembre 2018
Escapade à Puerto Madryn
Subi une suite incalculable de problèmes depuis trois ans, agressions, accident de circulation, inondation, et j'en passe : j'ai le coup de blues, mon ancre chasse, je vais talonner sur des hauts-fonds. Dans ces cas-là, la meilleure solution c'est d'abord d'aller tirer une bordée, et ensuite, d'aller faire un grand tour, se ressourcer dans la nature...
Pour la bordée, pas de problème, pour la nature, deux solutions : le parc miteux pas loin de chez moi, ou aller voir les baleines à Puerto Madryn, j'ai choisi la seconde. Le dimanche soir, retour de biture et affalé sur l'ordi, je cherche ; le lundi mon billet d'avion et les hôtels sont réservés ; le mardi les valises sont faites, je décolle... C'est là que j'apprécie l'énorme avantage de ne plus avoir de cours réguliers à gérer, ni de personne à charge, m'étant séparé de mon poisson rouge, décidemment bien trop bavard...
Voyage tranquille et sans encombre avec Lufthansa, comme à l'accoutumée. Le "remis" qui ne connait pas la ville (!) me fait tourner en rond pendant 20 mn pour trouver l'hôtel (mais sans surfacturation) et je pose enfin mes valises. Mais d'abord, et avant tout, une petite visite à mon amie Gilda que je retrouve à l'Academia Nacional del Tango, où se déroule une conférence... sur le tango !
Départ pour Puerto Madryn
Juste une journée pour poser mes bagages à l'hôtel dans lequel je vais revenir dans quatre jours, et direction Puerto Madryn, en bus bien entendu.
Bien entendu, car l'aéroport est loin de Puerto Madryn et mes expériences précédentes m'ont fait apprécier ce moyen de transport hyper confortable en Argentine... Sauf que !... Sauf que si, sur la destination d'Iguazu, éminemment plus touristique, les bus sont au top, et la clientèle ad hoc, vers le Sud il en va tout autrement. Le bus est nettement moins confortable, limite sale, et il faut y subir quelques autochtones... un peu rustiques. Les pieds sous mon nez, le Smartphone a fond, mon voisin commence à m'énerver. Une première remarque gentille avec le sourire, une deuxième gentille sans le sourire, à la troisième j'opte pour la version coup de gueule, il remballe tout, les pieds et le portable, me regarde méchamment, change de place... et une heure plus tard, revient, s'excuse et m'offre des bonbons, avec un air de ravi de la crèche un peu confus... Les hommes, décidemment drôle d'espèce ! Vivement les baleines !
On arrive !... après 16h00 de bus, pas top du tout... Pas de temps à perdre, je fonce voir les copines à bosse qui m'attendent. Le site est magnifique...
Et pas farouches les bébêtes ! A moins de trente mètres du bord de plage, ces dames batifolent. Ce sont parmi les plus grandes du monde, de quinze à dix-huit mètres de long, et elles viennent ici se reproduire en toute quiétude, pour notre plus grand bonheur.
Quelques heures au bord de l'eau, et déjà je me sens mieux...
Retour à l'hôtel. Il est tenu par un français sympathique... qui parle français : vu mon haut niveau en espagnol, c'est reposant. C'est petit, familial, et rempli de jeunes tous très sympas, moi compris (non mais !). Je vous le conseille : La Casa de Tounens. Prenez la grande chambre à l'étage, spacieuse et tranquille.
Rien que le nom ! Antoine de Tounens, vous savez bien ce jeune avoué de Périgueux, parti se faire élire Roi d'Araucanie (Chili) et de Patagonie (Argentine), sous le nom de Orllie-Antoine 1er : un destin palpitant ! Un historien, un vrai, a passé des années pour reconstituer l'aventure folle de ce visionnaire aventurier qui a failli offrir à la France tout le sud du continent américain. Si vous voulez lire cet ouvrage, armez-vous de courage : près de 1400 pages, réparties sur deux tomes... et écrits petits... Mais c'est un vrai roman, et on apprend plein de choses sur l'époque, sur Napoléon III, sur les trois alchimistes qui promettaient à l'empereur d'Autriche de fabriquer des tonnes d'or avec une recette miracle à partir de l'argent, sur la montée en puissance de Bismark au début des années 1860 (à l'époque où naissait la milonga) pour arriver à la guerre avec la France en 1870 (les premiers tangos en Argentine), etc... Deux tomes passionnants... pour 68 Eu chez Cultura... mais ça les vaut !
Bref, je suis bien tombé : c'est top ! Demain suite de l'aventure, j'impatiente !
La suite de l'aventure se passe d'abord en bus, encore, permettant de découvrir la péninsule de Valdes, plutôt aride, mais abritant néanmoins quelques habitants intéressants à observer, malheureusement de trop loin, surabondance de touristes oblige.
Mais d'abord, une petite visite de politesse aux pingouins, pas vraiment farouches.
Deuxième visite : les lions de mer. Impressionnantes les bestioles. Pendant la descente le long de la dune, nous assistons de loin à une bataille de mâles alpha : nous sommes en pleine période de reproduction, et les "cacous", locaux et aquatiques, s'en donnent à cœur joie. Violent et passionnant, mais scène trop rapide et lointaine, pour pouvoir prendre une photo. Nous les observons... à distance respectueuse. Le paysage est juste magnifique.
On mange rapidement dans l'unique restaurant prévu dans le cadre du forfait visite du promène couillon local, correct ni plus ni moins, ce sera nettement mieux à Puerto Madryn. Mais bon, je ne suis pas là pour ça, les copines à bosses m'attendent !
Embarquement sur un petit bateau, direction le centre de la baie, en fait pas très loin du rivage. Les baleines s'y promènent en toute confiance... ou viennent visiter... les visiteurs... Allez savoir ! En tout cas elles ne sont pas farouches. Elles viennent tout près du bord, et à un moment l'une d'elle est venue contre le bateau, pour passer ensuite dessous. Sans ma voisine qui, sans doute adepte des Mac Do locaux, m'a quelque peu encombré par son occupation de l'espace, je l'aurais touchée. Ma main s'est arrêtée à quelques centimètres...
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La lumière est fantastique : suivant l'orientation par rapport au soleil et l'heure de la journée, c'est mille nuances de bleu et de vert qui illuminent le décor. Du caviar pour les yeux !
Trop court ! Même si la visite dure! Redescente du Paradis en douceur. Une halte pipi sur le retour dans un mini musée, permet de mieux apprécier la taille gigantesque des animaux que l'on vient d'avoir le privilège de contempler : pas assez de recul pour photographier tout le squelette ! Il faut rentrer : un peu triste mais avec un sentiment incroyable de plénitude. Moment exceptionnel !
Ex-cep-tion-nel !
Le lendemain, changement de décor, je pars à la découverte de Puerto Madryn. Que nous sommes loin de Buenos Aires ! Population différente, habitudes culinaires différentes, tout est différent. D'abord un plage immense qui ressemble à celles que nous connaissons sur la côte ou en Espagne. La ville est propre, tranquille, on se croirait sur la Costa Brava, les hordes de touristes en moins. Le tango ? Ils en ont entendu parler, mais personne ici ne se sent concerné. Une autre Argentine.
Les chalutiers que vous voyez au fond sur la photo, c'est ce qui fait toute la différence avec Buenos Aires. Puerto Madryn a été fondée par des émigrés gallois, et le pays de Galle est renommé en Angleterre pour ses pêcheurs.
Normal la province est quasiment une péninsule entourée d'une mer particulièrement poissonneuse. Le poisson ! Quasi introuvable à Buenos Aires, hors de prix et toujours très mal préparé (même dans les rares restaurants spécialisés), il est ici en première place à la carte de tous les restaurants. Et les bons restaurants ne manquent pas, tous pleins à craquer, alors que nous sommes hors saison touristique : quasiment que des clients locaux. C'est vrai que c'est très bon et à prix abordable.
Mon préféré : El restaurante Malón. Toujours plein à craquer, mais c'est normal, c'est beau, c'est bon et c'est sympathique. Clientèle plutôt jeune et branchée, je dépare un peu, mais je me sens vite intégré. C'est vrai qu'à l'hôtel, la moyenne d'âge tourne plutôt autour de vingt-cinq ans, et je me suis habitué, sans problème, à ce décalage.
J'allais vivre avec le barman, un grand moment...
Vu le nombre de bouteilles exposées en arrière du bar, et l'habileté apparente du barman à préparer des cocktails, je ne peux résister et m'en vais lui en commander un. Mais lequel choisir ? Je lui demande conseil, il me suggère le cocktail maison. Pas le temps de dire ouf, il est en besogne, et... ça dure... ça dure... Epluchage de fruits, passage au mixeur puis au tamis, la recette n'en finit pas. Et là je m'inquiète : je n'ai pas demandé le prix ! Et plus ça dure, plus je pense que la note va s'allonger ! Dix bonnes minutes que le barman s'escrime, quand enfin il m'amène mon cocktail : absolument délicieux, un petit Jésus en culotte de velours, qui se glisse au fond du Palais, du haut de gamme, digne des Hilton que je fréquentais à une certaine époque. L'addition ? Environ 3,50 Euro... J'avais trouvé mon Paradis.
Deuxième grand moment : le dessert ! J'ai mangé trois fois dans ce restaurant, et après avoir gouté aux desserts locaux et blagué avec la serveuse, celle-ci me suggère de prendre un dessert... français... Effectivement un Paris-Brest figure à la carte. Il est excellent, ce qui est étonnant, mais le plus déconcertant, c'est qu'il est... carré ! J'appelle le patron, et lui explique l'origine de ce gâteau, et il m'avoue n'avoir jamais vu de relation entre la forme du gâteau et celle d'une roue de vélo. Tellement content d'avoir appris la chose, et me promettant de remédier à la présentation, il m'offrit un digestif, à la hauteur, en qualité et quantité, de tout le reste en ce lieu.
Le lendemain je reprends le bus, quittant à regret de cette petite cité, direction Buenos Aires qui m'attend pour mon sixième séjour dédié au tango... Cette fois le voyage se passe bien, en partie de nuit et la traversée de certains hameaux est fascinante... Je ne regrette pas l'avion. Adieu Puerto Madryn, mais, qui sait ? Peut-être... au revoir...